C’est la tradition. Chaque année, les sociétés de jeunesse fêtent l’arrivée du nouvel an en défilant dans leurs villages, tambours battants. La bonne humeur et le pétard festif sont au rendez-vous. La presse, 24 heures, La Région nord vaudois, se sont cependant fait l’écho des réactions négatives, parfois violentes, que ces manifestations ont provoquées cette année.
A Champvent, le 2 janvier dernier, aux alentours de midi, la fête a été interrompue par la police, alors qu’une quinzaine de jeunes déambulaient dans les rues. Suite à des plaintes. A Vuiteboeuf, des habitants sont descendus dans la rue pour demander aux tambours de la Jeunesse qui défilaient dans le hameau de Peney de « dégager ». (La Région, 25 janvier 2017). A Lavigny, la Jeunesse qui tapait le tambour dans le village a été prise à partie par les occupants de deux voitures. Coups à l’appui. (24 heures, 30 décembre 2016). Ces mauvais coucheurs n’ont sans doute jamais vécu un nouvel-an chinois, qui ferait d’ailleurs leur admiration s’ils étaient touristes, ce jour-là, du côté de Shanghai ou de Pékin. Mais surtout, ils ne connaissent même plus les traditions de leur propre pays ou du village qui les accueillent.
Charmante société. « La jeunesse, avenir du pays » et tout le tralala du genre « nos villages ne doivent pas devenir des cités dortoirs », ça fleurit dans les discours. Mais dès que des jeunes font la fête, et un peu de bruit, c’est vrai, mais sans dégâts et pour porter la bonne humeur de porte en porte, c’est insupportable à certains. Même une seule fois par an.
Les Jeunesses vaudoises ont le sens de la fête. Tant mieux pour elles et pour nous. Mais leurs sociétés ne sont pas seulement de joyeuses occasions de s’amuser en buvant des verres. Elles sont aussi un important lieu de formation, bénévole et utile. Alexandre Dafflon, assistant à la Faculté des sciences sociales et politiques de l’Université de Lausanne, en a fait le constat. Plutôt sceptique au départ, il a fait partager sa découverte dans un livre publié en 2015, aux éditions L’Harmattan : Il faut bien que jeunesse se fasse ! Et c’est ainsi qu’il résumait son expérience : « On ne fait pas partie des jeunesses campagnardes juste pour se marrer, mais pour s’investir, faire des choses utiles pour son village, sa société et soi-même.» (Migros Magazine, 7 avril 2015).
Une autre étude, menée avec l’Institut fédéral des hautes études en formation professionnelle, a même mis en évidence treize compétences acquises par les membres des sociétés de jeunesse au travers de toutes les manifestations qu’ils organisent, girons et compagnies qui réunissent des foules considérables. C’est une école de l’engagement et de la responsabilité. Elaboration d’un dossier de candidature, encadrement d’une équipe, mise en place d’un projet, d’une organisation, gestion logistique et budgétaire, intégration des mesures de sécurité, tout cela ne se passe pas au niveau des pâquerettes. 24 heures du 20 février 2015 l’avait souligné lors de la sortie de cette étude, en citant notamment l’exemple d’une femme de 23 ans. Elle avait géré avec succès un budget de 500’000 francs pour le giron de sa société de jeunesse. Qui dit mieux.
Fabrice Dunand